Datée du début du XVIIe siècle, la mosquée du Cheikh Lotfallah est la première érigée par la dynastie des Safavides dans la ville d’Ispahan, dans le centre de l’Iran. C’est un important édifice de la ville, en raison de la richesse de l’art et la beauté de son architecture.

 

Une merveille architecturale

D’après certaines sources, la construction de cette mosquée eut une durée comprise entre 1598 et 1619. Deux dates sont cependant inscrites dans le cadre technique, à savoir 1616 sur le dôme et 1618 dans le mihrab. Ce qui est confirmé, c’est que Mohammad Riza ibn Hussain fut l’architecte principal et Ali Riza-i Abbasi le calligraphe attitré. Il ne faut pas le confondre avec Riza 'Abbasi, un célèbre peintre, dessinateur et calligraphe de l’époque. Cet édifice est également appelé l’oratoire du roi, car seule la famille royale pouvait y accéder. Aucun minaret ne fut édifié, étant donné que l’appel à la prière n’était pas nécessaire. Il n’est donc pas étonnant que les plans de cette petite mosquée soient très atypiques. L’absence de cour, la présence d’escalier qui mène au portail et la salle de prière surmontée d’un dôme le rendent également très particulier. Des lambris d'onyx jaune et de la céramique glaçurée sont les principaux matériaux de construction. À l’extérieur, ce sont le bleu et les briques apparentes qui sont les couleurs dominantes. Du vert, jaune, rouge et turquoise viennent s’ajouter au décor, mais la palette dominée de jaune sur le dôme était rare à l’époque et rappelle le dôme du tombeau d’Ismail Ier, situé à Ardabil. Le portail est orné de muqarnas raffinées et la décoration intérieure est tout simplement impressionnante. La lumière extérieure illumine la grande salle et reflète sur la coupole, sous la forme de la queue d’un paon, l’emblème royal persan.

 

Les inscriptions à l’intérieur

En pénétrant dans la chambre de prière, on est confronté à des murs ornés de bleu, jaune, turquoise et du carrelage blanc avec des motifs arabesques complexes. Les versets coraniques sont omniprésents, tandis que les murs est et ouest contiennent des poèmes de Cheikh Bahai. Autour du mihrab, les noms des douze imams chiites et ceux du Cheikh Lutfallah, d’Ostad Muahmmad Reza Isfahani (l'ingénieur) et de Baqir Al-Banai (le calligraphe) sont inscrits. Le poème sur le mur de Cheikh Bahai consiste en une prière, un appel à l'aide des quatorze immaculés (Muhammad, Fatima et les douze Imams), alors que les inscriptions sur l'intérieur de la coupole soulignent les vertus de la charité, la prière et l'honnêteté. Elles expliquent la logique d’être disciple de l'islam et ses prophètes. Les passages chiites et leurs emplacements spécifiques de premier plan dans le mihrab, notamment sur les deux parois latérales et dans les bandes horizontales de chaque coin, soulignent la prééminence de cette croyance en Iran, durant le règne des Safavides. Le fait que deux poèmes de Cheikh Bahai - un partisan dévoué au soufisme - ornent les murs de la mosquée privée Shah Abbas prouve que même si certains éléments du soufisme ont été supprimés, ce mouvement de pensée a continué à jouer un rôle important dans la société safavide.